Wednesday, September 24, 2008

Un document sociologique



Ainsi donc, la grande saison des festivals est terminée. La tente est repliée jusqu'à l'été prochaine, où l'on découvrira probablement qu'une araignée oubliée lors du grand nettoyage a eu le temps de mettre au monde une progéniture nombreuse, les vaches reprennent leurs habitudes dans les verts pâturages malouins qu'elles fertiliseront à loisir en pensant avec un sourire en coin à ces salauds de festivaliers qui les exproprient tous les ans, ainsi que les avions sur l'aérodrome de Chaux qui un jour, c'est juré, feront un joli carnage en atterrissant sans crier gare sur les eurockéens insouciants.

Très loin des ruminants et des aéronefs, les salles parisiennes ont rouvert leurs portes. Il y a des avantages et des inconvénients, que vous pourrez classer dans les catégories idoines selon votre mode de vie : on ne transvase plus la vodka dans une bouteille en plastique, on ne fume plus devant les concerts, on ne croise plus des têtes d'affiches abominables en passant d'une scène à une autre, on dort confortablement dans son lit, à moins qu'on ne dorme dans un train de banlieue, sur un banc de Belleville, un coin de canapé, ou le lit de quelqu'un d'autre. Si on dort, évidemment.

On pourrait longuement discourir sur tout ce qu'on a découvert au cours de ces années de festivals accumulées. Nouveaux groupes, nouveaux amis, nouvelles expériences inattendues... Le temps ne fait rien à l'affaire, on finit toujours par trouver quelque chose de plus tordu que l'année précédente. Semer la zizanie dans un supermarché avec une balle rebondissante, ravager sa propre tente, démoraliser les jeunots qui voulaient draguer la british en traduisant malicieusement leurs apartés dans la langue de Jean-Marie Bigard, terminer la dernière nuit en plein jour en testant de nouvelles substances illicites, j’en passe et des meilleures (ou pires). On retombe toujours sur ses pattes. On retrouve par hasard le comparse raisonnable qui vient de se réveiller et qui suggère qu'il est temps de replier les tentes, ce dont on est strictement incapable dans l'état où on se trouve, et il y a toujours une nouvelle connaissance pour filer un coup de main. Ou on émerge tardivement au milieu d'un camping désert où il y a le nouveau pote des derniers jours, celui qu'on a rencontré par hasard parce qu'on arrivait à la bourre après avoir raté son train et avec qui on a sympathisé immédiatement en parlant musique, le type qui vous a attendu et qui vous dépose en voiture à la gare, où on trouve à racheter un billet pas cher, comme ça, par hasard, et ça paraît presque dommage parce qu’on était tenté par une journée de catamaran avec le nouveau pote en question. Faire absolument n'importe quoi semble être la meilleure option - tout ce qui en découlera ne sera que l'imprévu, et l'imprévu est souvent cool. Bien sûr, on aimerait avoir un souvenir de Sonic Youth jouant Daydream Nation l'an dernier, et on n'a qu'une zone de flou... Peu importe. On n'a pas le moindre regret, c’était marrant, on ne s'en porte pas plus mal. Sur le nombre de concerts vus chaque année, je peux bien en oublier quelques uns. Pour l'heure, parlons des groupes qui laissent une trace.

Logiquement, cher lecteur ô combien lecteur, tu devrais t'attendre à ce que je narre ce que j'ai vu un jour sur une scène provisoire quelque part dans ce vaste pays, voire un autre pays. Eh bien non, parce que je ne suis pas logique. (Sinon je ferais pas n'importe quoi comme ça, hein...) Le compte-rendu des Eurockéennes ? Ca attendra, il faut encore que je termine une première version complète et totalement impubliable avant d'en livrer par ici un résumé assez succinct, genre quinze pages. J'y travaille, ce sera sûrement pour Noël (et je comprends de plus en plus pourquoi on me parle de gonzo, mais passons). En attendant, il sera question ici :
- d'un type qui jouait dans un festival où je n'étais pas
- et d'un groupe qui ne jouait pas dans un festival où j'étais

Ce n'est pas aussi absurde qu'il y paraît. Les véritables découvertes au cours d'un festival sont de plus en plus rares, tant il est facile de jeter une oreille sur tous les groupes au programme avant d'y mettre les pieds.

C'est ainsi que je suis tombé sur Boogers, il y a trois ans. J'épluchais l'affiche des Rockomotives de Vendôme, souvent très recommandable, lorsque cet hurluberlu improbable m'a assailli les tympans de la meilleure façon qui soit. Comment était-il présenté ? Je ne sais plus trop, il faudrait que je retrouve le programme qui doit trainer dans ma chambre. J'ai des archives à faire blêmir la CIA, mais je pense qu'ils rangent un peu mieux. Ce qui convient bien au cas qui nous occupe, d'ailleurs. Vous prenez plein d'éléments épars dans la pop ou le hip-hop et plein de disques en tous genres, vous secouez le tout furieusement dans un garage mal insonorisé et vous dynamitez l'ensemble. Avec un peu de chance, vous verrez émerger Boogers, dans un amas de cendres et de références musicales, façon personnage de comics issu d'une mutation aberrante. Mais en beaucoup plus DIY, évidemment. C'est tout l'intérêt du truc : le super héros est un concept haute-fidélité, il va sauver le monde et finir par jouer dans des stades en emballant la blonde avant le générique de fin, c'est prévu; tandis que le bricolage de Boogers est franchement lo-fi, et de ce fait imprévisible (on pourrait parler de ses reprises, mais ne tuons pas la surprise). Le décrire est de toute façon hasardeux, alors autant caser un mp3, pas forcément le plus représentatif mais celui qui m'avait sauté aux oreilles et qui se trouvait sur la compile des Rockomotives, et le seul que je retrouve à l'instant dans mon dossier "emergency music" avec les trucs que j'aime vraiment beaucoup vu que mes CDs sont en foutoir et que j'écris dans un état proche d'une fin de festival, l'univers est étrangement cohérent :

Boogers - Ashtray


L'autre découverte de festival hors festival, c'est Johnny Boy.
J'étais à la Route du Rock cet été (comme tous les ans) et on m'alpague. C'est un fort joli mot, d'accord, mais c'est pas une raison, alors quoi ?... C'était une fort jolie fille. Bon, c'est une raison, on peut négocier. Elle m'alpaguait à cause de mon t-shirt des Thermals (il paraît que je le porte trop souvent, mais ça a parfois du bon) parce que son pote qui était là était terriblement fan des Thermals. Je me suis donc retrouvé à discuter avec son pote, ce qui veut dire que j'ai du merder quelque part, et on a forcément causé musique. Et cet individu que nous appellerons Samuel, fort sympathique au demeurant (quoique moins hormonalement attractif que sa compatriote nantaise), était comme moi fan des Thermals (sinon je porterais pas un t-shirt avec des canards - quoique...) de Jon Spencer et de plein de bonnes choses de bon goût dans ce genre. Et il me conseille Johnny Boy. Forcément, je retiens le nom.

Johnny Boy - ah ben non, j'ai pas de mp3 sous la main, allez voir sur myspace si j'y suis (j'y suis).



Boogers et Johnny Kid joueront ce mercredi à l'International, une nouvelle salle qui vient d'ouvrir rue Moret, proche du Nouveau Casino et de la Cantada. On espère que le lieu sera à la hauteur de sa programmation (depuis le début du mois, Helluvah, Seth Augustus, Nervous Cabaret, Enablers... on a vu pire). On espère que l'alchimie bar + concerts gratuits n'engendrera pas la même moisissure humaine qu'ailleurs, en d'autres termes que le rebut des flècheux recalés rue de Bagnolet mourra sur place au lieu de venir nous pourrir l'existence ici. (Oh, puisqu'on évoque la Flèche d'Or : j'ai appris récemment qu'un concert de The Love Bandits y avait été annulé au dernier moment il y a quelques mois parce que le videur refusait de laisser entrer le guitariste, malheureux musicien qui ne parvenait pas à convaincre l'abruti de service qu'il faisait partie d'un groupe qui devait jouer le soir même... Sérieusement, on fait quoi, dans ces cas-là ? Napalm ? Grenade ? Ou on espère FRANCHEMENT que l'International sera autre chose ?)

Johnny Boy se lance dans une tournée française que vous pouvez checker sur myspace (parce que je suis un peu trop plouc pour être sur Facebook, c'est sans doute ça).

Boogers se lance également dans un semblant de tournée qui commence par pas mal de dates à Paris, notamment une Nuit Blanche le 4 octobre qui s'annonce assez exceptionnelle puisqu'on y verra aussi le Club Des Chats (duo épileptique fréquemment vu avec Lapin Machin et qui mérite tous les éloges), Laurence Wasser, et GaBLé. GaBLé qui viennent de remporter le CQFD des Inrocks (comme quoi les Inrocks savent parfois où trouver les bonnes choses, n'est-ce pas... oh well), GaBLé (c'est toujours le même lien) qui seront cet automne aux Rockomotives (cohérence de sa mère), GaBLé (mais cliquez pas à chaque fois, c'est le même lien je vous dis) qui ont une vidéo fabuleuse que je ne résiste pas à vous proposer ici, Drunk Fox In London. Ca devrait faire marrer quelqu'un qui est souvent drunk in London et qui kiffe les renards. J'aurais pas cru au départ mais ce truc est ce que j'ai écrit de plus cohérent depuis longtemps.



3 Comments:

Anonymous Anonymous said...

Bonsoir à vous deux, je voulais juste vous dire quelque chose, pour que vous n'ayez pas peur d'écrire dans le vide, il y a des gens qui vous lisent tous les jours. Vous ouvrez les oreilles de ceux qui n'ont pas le temps de le faire, on vit un petit bout hors du temps grâce à vous. Mais faut pas croire que parce qu'il n'y a pas de commentaires, il n'y a personne non plus. C'est le problème de nombreux blogs, hein. Si le Net était un océan, je sais pas où on caserait toutes les bouteilles balancées au jus. Quelle marée... Mais continuez, c'est bien. Merci

9:42 AM  
Blogger Primus said...

Ben merci à toi, cher lecteur ô combien anonyme. Les gens qui nous lisent tous les jours sont d'autant plus méritoires qu'on n'écrit pas tous les jours, loin s'en faut. Je suppose donc qu'ils nous relisent quotidiennement en attendant nos nouvelles aventures. (Ah non, c'est pas à ce point ? Bon, ça fait plaisir quand même.)

10:57 PM  
Blogger Primus said...

(En fait c'est moi qui devrais me relire, je viens de corriger deux fautes de grammaire.)

11:03 PM  

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